Oser le flou pour faire de la belle photo

Et si votre appareil photo se transformait en un pinceau et une toile?  Si vous pouviez faire le geste de peindre plutôt que de déclencher?  Si les photos que vous pouviez produire se rapprochaient des toiles de Monet, de Serrat, de Renoir?  Si vous vous sentiez complètement libre de bouger votre corps et vos avant-bras pendant que vous preniez une photo?  Vous seriez partants pour éprouver ce sentiment de liberté et de créativité?  Bienvenue dans l’univers du flou.  Le beau flou voulu, souhaité, recherché.

Merci d’être à notre rendez-vous hebdomadaire et bon retour à ceux et celles qui reviennent de vacances.  L’article de cette semaine m’amène à revenir sur de très beaux moments qui ont habité mes vacances, des moments où j’ai eu l’immense plaisir d’explorer le bel univers de la photo floue – et où j’ai surtout eu le sentiment de trouver un espace de liberté.

Le flou que je vais aborder cette semaine m’a été inspiré par un très bon article publié il y a quelques temps dans le blogue «Naturephotographie» d’un photographe que j’apprécie énormément, soit Philippe Sainte-Laudy.   Son article sur la paintography illustré par ses photos remarquables démontrait le potentiel créatif de transformation qu’on pouvait réussir à partir d’une photo à l’intérieur de Photoshop afin que nos photos prennent l’apparence d’un tableau.  Si vous faites des recherches sur le Web quant à la peintographie («paintography» en anglais), vous verrez plusieurs exemples de réalisation de photos prenant des allures de tableaux et de toiles grâce à un traitement logiciel.  Les photos de Philippe sont particulièrement magnifiques et réussies en raison d’un certain minimalisme qui me rejoint beaucoup.  Mon admiration devant son travail est immense.

Je crois toutefois qu’on est en mesure d’atteindre des résultats similaires aux effets obtenus grâce à une fonction dans Photoshop directement à partir de notre appareil photo. Lors de mon séjour à  Anticosti dont je vous faisais part récemment, je me suis amusé à créer des tableaux impressionnistes directement dans mon boîtier photo.  À titre d’exemple, j’avais repéré aux abords d’un boisé ces trois bouleaux entourés de belles fleurs.  Rien de spectaculaire mais ces arbres et fleurs créaient un beau tableau.

J’ai toutefois diminué ma vitesse pour ramener celle-ci à 1/13 seconde, (ISO 400) grâce à une ouverture de F22.  Lors du déclenchement de votre appareil, j’ai fait un léger mouvement vers le haut pour créer ce flou.  Le mouvement ascendant plutôt que latéral s’imposait en raison de l’orientation des bouleaux.  Je me suis amusé à faire quatre à cinq essais différents, y compris une tentative d’un mouvement latéral avec une certaine amplitude mais le résultat ci-dessus est celui qui me plaît le plus de cette série.

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Voici un autre exemple.  Ces roseaux dans un marais baignaient dans une belle lumière et avaient un certain attrait.  J’aimais bien leur couleur et mon oeil est toujours attiré par des sujets qui présentent un certain minimalisme. Déjà en soi, ces roseaux se présentaient comme des traits de pinceaux sur un fond monochrome.  Le tout n’est pas inintéressant. Toutefois ma photo a pris une tournure plus inusitée lorsque j’ai eu recours à la technique du flou de bougé.   Encore une fois, j’ai réduit ma vitesse à 1/13 sec., ouverture F13, ISO 100 et j’ai fait un léger mouvement du bas vers le haut en déclenchant.  Le mouvement ne devait être ni brusque, ni soudain mais plutôt comme le geste calculé d’un peintre.

Vous pouvez d’ailleurs constater que ce mouvement vers le haut a enrichi ma photo de certaines tonalités dans le haut de mon cadre qui n’auraient pas été présentes dans ma photo statique initiale.  L’arrière-plan des roseaux se dévoile un peu plus.  Le fait qu’on expose plus longtemps provoque un peu plus de luminosité dans notre cadre.  Avec ce léger mouvement, voilà une photo «à la Monet».   Ci-dessous, un autre exemple avec des quenouilles.

 

Quand le flou mène à tout 🙂

Une fois qu’on introduit le mouvement au moment de prendre la photo, un sentiment de liberté commence à nous habiter.  Même si on prône souvent le fait de recourir à un trépied pour avoir une grande stabilité, utiliser un déclencheur souple pour éviter de faire bouger notre appareil au moment de la prise de photo, favoriser une petite ouverture pour obtenir le plus de détail possible dans notre photo, il y a un plaisir certain à rompre avec toutes ces pratiques le temps de quelques photos.  Voilà que nous effectuons un léger mouvement en prenant notre photo.  Et si on bougeait beaucoup?

Voilà qui est fait…et j’aime!  Wow.  Ci-dessus le résultat d’un pivot de 180 degrés sur moi-même sous un arbre.  Véritable tourbillon de formes avec une belle symétrie.  J’ai fait plusieurs essais avec des résultats tout aussi intéressants les uns que les autres.  Ma vitesse était de 1/6 sec., F16, ISO 100.  La vitesse lente était possible en raison d’une journée nuageuse où le soleil peinait à percer.  Tant mieux.  Quelle meilleure façon de profiter d’une journée avec une lumière ingrate pour créer des flous de bougé et des tableaux!  Faites-en l’expérience.  Choisissez votre sujet adéquatement et pivotez sur vous-même à vitesse lente.  Les résultats seront surprenants.  Surtout que l’automne se pointe le bout du nez chez nous actuellement.  Imaginez les photos que vous pourrez prendre avec les coloris des feuilles d’automne.  Magique et spectaculaire!

J’ai repris ce même mouvement devant une plate-bande de fleurs dans un sous-bois.  La lumière tamisée me permettait d’atteindre facilement une vitesse lente.  

Encore plus

Vous aimez jusqu’à maintenant?  On continue?  Soit!  On peut aller encore plus loin dans le flou de bougé grâce à la «drive-by photography».  Qu’est-ce?  C’est une pratique qui consiste à profiter du fait que vous êtes à l’intérieur d’un véhicule en mouvement pour créer des photos.  On a bien entendu tous à l’esprit les photos produites en milieu urbain, dans un tunnel, une rue principale, avec ou sans des lumières de Noël, photos où l’on voit le chauffeur et un spectacle fascinant au travers de son pare-brise.

Dans ce cas-ci, j’ai profité du fait que le copain René était au volant pour faire des photos en pause lente.  Le défi – dans le décor d’Anticosti – consistait surtout à identifier les emplacements les plus intéressants et à déclencher au moment opportun.  Cette pratique donne de bons résultats lorsque le véhicule circule à une vitesse relativement lente (20 – 40 km/h).  Généralement, mon ouverture était de F8, ISO 100, 1/20 seconde.  On peut évidemment s’amuser avec la durée d’exposition afin de rendre notre sujet plus ou moins précis.  Les meilleurs résultats coïncidaient généralement lorsque notre véhicule était secoué en raison de l’état de la route de terre ou de pierre, ces surfaces constituant 99% du réseau routier de l’île d’Anticosti. 🙂

Dans les deux cas ci-haut, ma vitesse d’exposition m’a permis d’avoir le sujet relativement précis.  Par contre, si vous optez pour une vitesse plus lente encore, vous obtiendrez un résultat plus abstrait, ce qui n’est pas sans me déplaire et qui convient à l’espace de liberté recherché.

Oser la liberté du mouvement

La photographie peut être plusieurs choses.  On la connaît comme étant une pratique gouvernée par des règles et des principes.  Règle des tiers, profondeur de champ, stabilité, netteté, règle du premier plan, ligne d’horizon, ligne de fuite, etc.  Il est vrai qu’une bonne photo repose sur la mise en pratique de plusieurs de ces éléments pour qu’un tout cohérent soit présenté à vos lecteurs – sans oublier pour autant l’importance d’avoir une bonne histoire à raconter par le truchement de votre photo.

Toutefois, la photographie peut aussi être un espace de liberté et de mouvement.  Votre boîtier n’est pas condamné à être en position statique.  Créez  un mouvement, peignez, dessinez.  Découvrez l’abstraction.  Vous ne capterez pas la réalité telle qu’on la perçoit généralement mais vous saisirez probablement l’évocation d’une énergie et d’une atmosphère des lieux que nous ressentons généralement.

J’espère que l’article de cette semaine vous plaît.  Comment réagissez-vous au type de photos dans cet article?  Devrait-on exercer la photographie avec rigueur?  Si vous avez introduit le mouvement dans vos photos, dans quelles situations est-ce le cas?  Faites-nous part de votre expérience.  N’hésitez pas à commenter.  Vos mots sont importants.

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13 commentaires pour Oser le flou pour faire de la belle photo

  1. marina dit :

    BRAVO ! Et merci, je fais de la photo depuis peu et vous exprimez exactement ce que j’avais envie de faire (une envie réelle, je me fous de savoir si cela a déjà été fait ou pas )
    Et je réfléchissais comment m’y prendre techniquement, et votre article est là. Généreux et libre, merci Louis.

  2. fabien dit :

    Bonjour,
    Super article et cela me donne d’autres idées de photos en jouant sur la vitesse et le mouvement. Merci également de m’avoir fait découvrir un super photographe à savoir Philippe Sainte-Laudy (qui habite la même région que moi à savoir l’Alsace !!!) respect et admiration pour son travail magnifique.
    Au plaisir de vous suivre.
    Fabien

  3. Den B dit :

    Merci pour cet article
    Cela donne des idées !

  4. Justin dit :

    Paintography ? Ah ! Ces très petits photographes qui essaient encore de faire ressembler la photographie à ce qu’elle n’est pas !!! Rien de remarquable dans ce que j’ai vu : seulement du tape-à-l’oeil, de la saturation maximale, du kitsch.

    • Merland dit :

      Sainte-Laudy : du déjà vu mille fois, visée artistique nulle, hyper-retouché en post-production. Saturé le plus souvent. Mais c’est vendeur, car le commun des mortels (souvent inculte en photographie) n’y voit que du feu brûlant les prunelles. lol

  5. vbonnefond dit :

    Encore un excellent article, très riche. Grand bravo pour ta créativité et tes conseils avisés. Une autre idée pour le flou de mouvement : sur trépied solidement amarré, arbres/fleurs/hautes herbes (etc…) par grand vent (on n’en manque pas ici, dans le sud de la France ;^)

  6. Le flou créatif… intéressant du moment que cela soit un procédé occasionnel et ne soit pas un procédé gratuit. C’est l’intention du photographe qui importe.
    Et surtout du moment que l’on ne refasse pas ce que l’on a déjà vu maintes fois.
    Montrer des arbres floutés ou des forêts floutées ? Quelques grands photographes initiateurs l’ont déjà fait il y a plus de vingt années ! La difficulté est d’avoir une vision personnelle quel que soit le projet.

  7. Bonjour Louis,

    Encore un article complet et bien illustré, bravo!
    Merci également pour la mention, très apprécié :))
    Au plaisir de te lire.

  8. Gaston Quirion dit :

    Tout comme Mélanie je fais à la fois de la peinture et de la photo. .Tu sais ,Louis, que j’aime faire de mes photos des photos-tableaux …Ton article et les photos qui l’accompagnent me renseignent sur une technique soit celle du flou photographique, , qui me rejoint .J’ai hâte de l’explorer.
    Merci, Louis pour tes articles enrichissants . .

  9. Mélanie dit :

    Superbe !!! Je fais de la peinture et de la photo… le deux réunis; un seul mot MAGNIFIQUE !!!

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