Vous voulez obtenir des photos comme celles des photojournalistes? Avec du contraste? Beaucoup de personnalité? Des zones lumineuses où le sujet se révèle? Il faut alors se tourner vers la technique préférée des photojournalistes soit «exposer pour les hautes lumières». Démonstration du principe avec des situations photo où se côtoient allègrement des zones d’ombre et de lumière. Habituellement, ces situations sont tout indiquées pour nous piéger et piéger notre boîtier mais par pour longtemps. Après la lecture de cet article, vous aurez la connaissance. Ommmmm! 😉
Merci d’être présent à ce nouveau rendez-vous. J’espère que vos vacances sont ou auront été agréables. L’article d’aujourd’hui m’a été inspiré par une Webconférence organisée par LaPresse+, notre quotidien numérique à Montréal. La Webconférence mettait en vedette Martin Tremblay, directeur photo et vidéo de LaPresse+. Martin Tremblay a une feuille de route importante comme photojournaliste, comme en fait foi ce court reportage sur ce dernier par la Vitrine culturelle. (Note: comme à l’habitude, n’hésitez pas à cliquer sur les photos pour voir celles-ci en plus grand format sur la plateforme Smugmug.)
LaPresse+ est un des trois quotidiens disponibles à Montréal, dont l’un des deux en français. LaPresse+ a pris l’audacieux pari, il y a quelques années, de supprimer peu à peu sa version papier pour se concentrer exclusivement sur le numérique, souvent consulté via tablette numérique ou sur le Web. Pour ma part, j’étais déjà lecteur de La Presse dans sa version papier. J’ai rapidement basculé vers le numérique d’autant plus que l’image, la photo, occupait une part importante dans l’édition numérique. Les photos permettent des exercices fort créatifs de mise en page. En plus, les photos sont pleinement mises en valeur grâce aux tablettes et à l’éclairage arrière, contrairement au papier journal. Bref, le qualité du travail des photographes de LaPresse+ peut être vraiment appréciée et que je n’allais pas rater la chance de participer au Webinaire de Martin Tremblay.
Un élément soulevé par Martin Tremblay a particulièrement retenu mon attention soit le fait qu’il s’applique souvent à exposer pour les hautes lumières. Qu’est-ce que ça veut dire? Ça veut dire que dans certaines situations photographiques où la scène est partagée entre l’ombre et la lumière, il faut faire un choix. En prenant le contrôle de votre appareil photo, il faut l’amener à faire un choix, et surtout le choix que vous voulez. Voulez-vous que les détails dans l’ombre soient visibles ou encore souhaitez-vous plutôt que les détails dans les zones lumineuses soient perceptibles? Exposer pour les hautes lumières revient à faire le choix qu’on veut privilégier les détails dans les zones très lumineuses, ce qui créera alors de forts contrastes et des zones sombres.
Pourquoi? Et comment?
Lorsqu’on expose en fonction de hautes lumières, l’appareil comprend qu’il a à exposer moins longtemps que si on exposait en fonction des zones sombres. L’appareil obtiendra plus rapidement les détails d’une zone lumineuse que les détails d’une zone sombre. Par conséquent, la durée d’exposition sera généralement rapide et les zones d’ombre seront alors plus sombres. À l’inverse, si on expose pour les zones d’ombre, la durée d’exposition plus longue que précédemment fera en sorte que les zones lumineuses pourraient être «brûlées», c’est-à-dire être d’un blanc tel qu’on ne distinguera aucun détail. Dans le cas de la photo du lecteur de pensées et de sagesse dans la rue d’un quartier chinois, nous ne pourrions distinguer les caractères sur la jaquette de l’ouvrage si j’avais exposé pour les zones d’ombre.
La zone lumineuse va donc se détacher et se démarquer dans la scène – à l’instar d’une scène de théâtre où on ferait de l’éclairage non pas sur la scène entière mais plutôt sur une zone ciblée. Lorsque des sujets vivants peuvent être présents dans notre cadrage, il faut parfois attendre que ces derniers fassent leur apparition dans la lumière.
Comment fait-on pour exposer pour les hautes lumières? Il faut amener notre appareil à faire une lecture avec son photomètre spécifiquement sur une zone lumineuse. À cet effet, je vous renvoie vers un article que j’avais écrit sur les différentes mesures d’exposition présentes dans nos appareils. Entre autres, vous pouvez utiliser la mesure spot de votre appareil photo pour faire une lecture sur la partie lumineuse dont vous voulez obtenir les détails. En tenant compte de votre ouverture et des ISO choisis, votre appareil va vous indiquer la vitesse à privilégier. Vous pouvez alors vous mettre en mode vitesse et ajuster votre vitesse selon la lecture de votre appareil. Vous saurez ainsi que toutes les photos que vous prendrez à cette vitesse vont préserver les détails dans les hautes lumières.
Les nouveaux appareils – lire sans-miroir ou encore compact – ont une fonction qui m’horripile souvent mais qui est également pratique, soit celle qui fait un ajustement de la durée de l’exposition en fonction de l’endroit où on fait la mise au point. Je rage souvent mais disons que ça permet aussi – et rapidement en prime – d’obtenir une lecture sur les hautes lumières. Cette stratégie fonctionne si la zone lumineuse sur laquelle vous faites la mise au point est au même niveau que votre sujet éventuel dans la profondeur de champ. Si ce n’est pas le cas, faites la lecture sur votre zone lumineuse, puis ayez recours à la mémorisation d’exposition si votre appareil est doté de cette fonction. Vous pourrez ensuite ajuster votre mise au point sur votre sujet tout en conservant les paramètres pour les hautes lumières.
Cas pratiques
Les camions pour la bouffe de rue sont souvent des sujets qui nous permettent de mettre en pratique le choix pour les zones à exposer. Le comptoir est habituellement illuminé par l’éclairage du jour. Toutefois, l’intérieur du camion est souvent plus sombre. Qui plus est, les personnages se déplacent beaucoup dans un camion de bouffe de rue, tantôt pour cueillir une commande, tantôt pour cuisiner à l’arrière, tantôt pour remettre la commande. Le photographe doit alors faire un choix: exposer pour les hautes lumières (souvent le comptoir ou l’avant-plan) ou encore pour les zones d’ombre. Faire le choix des hautes lumières est intéressant et créera des zones lumineuses et d’ombres. Reste à attendre le moment judicieux où le personnage se révélera dans la lumière.
Dans le cas de la photo ci-haut, la zone lumineuse pour laquelle j’ai choisi d’exposer est celle à l’intérieur du camion. Elle est d’une intensité similaire à celle qu’on retrouve sur le tuyau d’évacuation d’air. En exposant pour cette zone, j’ai conservé les éléments de texture sur la paroi tout en créant des noirs plus profonds sur le vêtement du cuisinier et d’autres éléments dans la cuisine. Et non, vous ne rêvez pas: c’était l’hiver et il y avait une chute de neige.
Autre démonstration. Le revêtement en aluminium du camion et du panneau relevé suscitait un éclairage très lumineux. J’ai choisi d’exposer en fonction de l’extérieur du camion de rue et j’ai profité du fait que les visages des employés étaient à proximité de l’éclairage du jour (et dans ma direction) pour déclencher.
Démonstration par l’exemple. En haut ou en bas, c’est la même photo. Ma photo originale est celle du bas puisque j’ai fait ma mesure d’exposition sur les boîtes de carton qui accueillent les repas. Dans celle du bas, vous voyez comment la couleur est plus naturelle pour le carton. J’aime aussi comment les visages se révèlent dans la pénombre. Pour la version du haut, j’ai laissé Lightroom faire les ajustements automatiques. Évidemment, le le logiciel a choisi d’augmenter l’exposition de même qu’éclaircir les ombres. Conséquence: les boîtes sont blanchies, les masses d’ombre réduites, des détails gênants dans l’arrière-plan apparaissent. J’aime davantage une photo avec un minimum d’éléments, soit la lampe arrière, quatre boîtes de carton et leur contenu bien exposées et les deux personnages concentrés dans l’action que la version du haut où une foule de détails nous égarent.
Dans le cas ci-haut, la zone lumineuse à préserver est celle de l’aluminium illuminé avec le motif entre les deux personnages. Il est facile de s’imaginer le résultat si on avait choisi d’exposer pour les zones sombres. Cet endroit serait devenu une tâche blanche sans relief aucun. Au contraire, le motif dans l’aluminium et sa répétition est intéressant. J’ai déclenché à plusieurs reprises au moment où je jugeais qu’un ou l’autre des personnages s’avancerait vers le comptoir et que sont visage se révélerait à la lumière. Au final, j’ai retenu cette photo où une commande a amené les deux personnages à émerger.
Dans le cas de cette dernière photo, le noir ne manquait pas 😉 Il aurait été facile d’exposer pour le noir et pourtant, pourquoi l’aurai-je fait. Si on laisse l’appareil exposer pour le noir, il risque de vouloir tendre vers le gris 18% n’est-ce pas? Pourquoi perdre toute cette personnalité? J’ai déclenché à quelques reprises selon les interactions des personnages.
C’est rigolo comment une virée photo pour un événement de bouffe de rue est devenu une occasion pour mettre en pratique le conseil de Martin Tremblay. Au bout du compte, y’a plusieurs sujets qui baignent dans l’ombre et la lumière et nous amènent à faire des choix. J’espère qu’avec l’article d’aujourd’hui, vous saisissez ce qu’est la mesure d’exposition, les choix possibles et les résultantes de ces choix.
Pour les lecteurs du blog, avez-vous d’autres sujets à suggérer pour faire des essais de mesure d’exposition? N’hésitez pas à commenter ou à poser des questions si d’autres précisions vous étaient nécessaires. Vos mots sont importants et votre présence essentielle.
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