Au-delà de l’égoportrait

Et si vous vous mettiez en scène?  Si, si, comme un metteur en scène dans une pièce de théâtre.  Si vous teniez compte du décor, de l’environnement, de la situation et que vous deveniez un personnage dans cette situation?  Voilà qui vous permettrait de faire des égoportraits («selfies») mais différents, plus révélateurs de votre personne que les très populaires «m’as-tu-vu en si belle compagnie et à tel endroit?» qui sont devenus la norme. Et vous savez quoi?  Pas besoin d’un «selfie stick» pour y parvenir.  On essaie?

Bon début de semaine à vous tous.  J’espère que vous passez de bons moments parmi les vôtres.  Si vous faites vos premiers pas en photo et que vous avez reçu en cadeau un nouvel équipement photo, bienvenue sur ce blogue où vous trouverez plusieurs articles avec des conseils pratiques pour votre cheminement.  Parmi ceux-ci, je vous invite à consulter mon article Une leçon photo de quinze minutes pour un débutant.  Pour ceux qui maîtrisent bien les fonctionnalités et les principes photo, n’oubliez pas l’essentiel: l’importance de votre vision et l’identification de vos intentions.  Après tout, ma propre règle des tiers n’est-elle pas: «Vision, émotion, moment».

Même lorsqu’on fait un portrait de soi, il y a la possibilité d’aller au-delà du superficiel.  Il est possible d’avoir une vision, d’avoir une intention créatrice et de bien choisir son moment.   J’ai repéré dans mes archives quelques photos où je me suis mis en scène de diverses façons et avec différentes techniques.  Et aucune d’entre elles repose la longueur de mon bras 😉

Le reflet comme moyen classique

La pratique de se prendre en photo est presque aussi vieux que la photographie elle-même.  Vous avez des doutes?  Prenez une minute pour parcourir cet article du blogue du Museum of the City of New York.  Vous pourrez y voir des «selfies» des années 1910-1920. Vraiment, nous n’avons rien inventé.  Si le fait de tenir un appareil à bout de bras se pratique depuis le siècle dernier, les photographes qui ont réalisé un portrait d’eux ont surtout privilégié les reflets pour se mettre en scène.  Reflet dans une vitrine, reflet dans un miroir.  Si le procédé est simple et facile, il faut faire preuve de beaucoup de créativité pour réussir une photo qui se démarque.  Une des photos les plus réussies à mon avis est celle du photographe américain Dennis Stock.  Les éléments graphiques sont superbes, le noir profond de ses gants, cheveux et ombres donne un rendu intimidant, la forme même de l’appareil du photographe et la position de l’objectif et du viseur devenant les yeux du photographe est très réussie.

S’il est possible de travailler avec un miroir qu’on peut déplacer pour éliminer des éléments dans l’arrière-plan, il en est tout autre avec le reflet dans une vitrine. Plusieurs éléments s’invitent à la fête et il s’agit alors de repérer l’endroit et la composition qui servent le mieux notre vision et notre intention.   Dans ce cas-ci, la présence d’un néon en cercle dans une vitrine avec des éléments graphiques superposés était une invitation facile pour faire un autoportrait.  Dans le traitement numérique, j’ai légèrement désaturé la photo dans Lightroom et je n’ai pas tenté d’insister avec la netteté compte tenu du flou dans le reflet.

Situation du même type.  Ce torse dénudé dans la vitrine du bijouterie m’a permis une petite mise en scène où je me suis organisé pour que ma tête et mes bras soient positionnés en fonction de ce torse.  Soyez sans crainte, je n’ai pas la prétention de me prendre pour un bijou. Toutefois, l’essentiel de mon propos est que des reflets existent partout.  Je vous suggère toutefois d’avoir l’oeil pour repérer des éléments qui vous permettront une mise en scène, un récit, une blague même, bref qui permettront de créer une photo narrative.  Comme dans le cas de la photo plus haut, votre cadrage peut également avoir des qualités graphiques grâce à des formes, des zones claires/obscures et le jeu entre des éléments flous et d’autres plus précis.

Avec les reflets, il y a toutefois la possibilité de faire des mises en scène de plus grande importance.  Dans ce cas-ci, j’ai repéré cette vitre en oblique et en hauteur à l’aéroport. Comme vous pouvez le constater, j’étais moins intéressé à me prendre en photo mais plutôt à m’inclure dans ce jeu de silhouettes et d’ombres, m’assurant que celles-ci se distinguaient bien les unes des autres.  Je passe presque incognito, et c’est bien comme ça. 🙂

Ice climberLorsqu’on n’a pas de modèle, on peut aussi recourir à nos propres services. 😉 Vive alors le retardateur (10 secondes) ou un déclencheur à distance et un bon trépied.  Dans ce cas-ci, j’ai eu recours à deux flashs avec des cônes spot («snoots») dont je venais de faire l’acquisition.  Les habitués des sports d’hiver reconnaîtront des piolets de même que les vêtements pour l’escalade de glace. Dans ce cas-ci, encore une fois, votre mise en scène s’articule en fonction de vos intentions.  Comment souhaitez-vous vous présenter?  Que souhaitez-vous exprimer?  Encore une fois, on peut dire que je révèle des choses à mon sujet mais avec timidité.  Voilà une photo qui vous laissera peut-être de glace (LOL).

«Et un esprit passa...»
Voici une mise en scène un peu plus complexe et que j’ai réalisé dans le cadre d’une longue exposition.  Aux abords de ce pont, j’ai fait une longue exposition de 60 secondes.  Je ne me souviens plus si j’ai déclenché à distance ou encore si je suis allé prendre place après le déclenchement de la photo.  Toujours est-il, j’ai été présent dans la composition pendant une quarantaine de secondes d’où cette présence diffuse qui peut aussi faire croire à une double exposition.  Bien entendu, lorsqu’on a recours à une longue exposition, le trépied est nécessaire tout comme un filtre neutre.  Un déclencheur à distance est également nécessaire si l’emplacement que vous vous donnez dans votre mise en scène est à bonne distance de votre appareil.  Nathan Wirth excelle dans ce genre de composition.

La technique d’exposition lente peut également être mise à profit pour vous inclure dans un décor en manque de présence humaine.  Dans ce cas-ci, j’avais un shooting pour illustrer certains lieux corporatifs. Toutefois l’endroit était relativement peu passants.  J’ai adopté avec mon trépied une perspective en légère contre-plongée.  ISO 100, F9, vitesse 0,8 seconde.  Avec mon retardateur de deux secondes, je me suis mis en mouvement pour m’inclure dans la composition.  Plusieurs savent combien j’affectionne ce genre de silhouettes fuyantes et en mouvement.

Bref, l’égoportrait n’est pas né avec l’invention du portable/cellulaire.  Toutefois, la facilité à produire des photos avec nos cellulaires et les impératifs actuels des réseaux sociaux font en sorte que les égoportraits sont légions.  À titre de photographes, vous pouvez toutefois envisager produire des selfies qui se démarqueront.  Voyez-vous d’autres possibilités à exploiter?  N’hésitez pas à commenter, vos mots sont importants.  

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Un commentaire pour Au-delà de l’égoportrait

  1. Se mettre en avant aujourd’hui dit infiniment de choses sur l’époque que nous vivons. Il s’agit forcément de se réapproprier quelque chose sur l’époque et l’espace dans lesquels nous évoluons. Mais il y a, je crois, une différence importante entre le selfie et l’autoportrait et elle est sans doute dans cette volonté de mise en scène. D’un point de vue strictement sociologique, la nuance est plus quantitative – l’intention et les moyens mis en œuvre – que qualitative à mon sens.

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