Mettre l’hyperfocale dans votre sac photo

Décisions, décisions, décisions. Parfois on veut une faible profondeur de champ et un arrière-plan flou.  Parfois, c’est l’inverse, soit une grande profondeur de champ.  À ces occasions, on aimerait bien que notre avant-plan et notre arrière-plan aillent une netteté similaire, surtout si on songe à un tirage grand format de notre photo.  Que faire alors?  Comment y parvenir?  La solution réside-t-elle dans le choix d’une ouverture à F22 ou plus?  F32 si possible?  Non!  Vive l’hyperfocale.  C’est difficile à expliquer, facile à comprendre et tellement utile sur le terrain.  Courage, plongeons!

Merci d’être à notre rendez-vous.  Mes préparatifs vont s’amorcer pour les safaris photo de René Bourque sur l’île d’Anticosti d’ici quelques semaines puisque j’aurai le plaisir d’accompagner les groupes.  J’en profite donc pour me replonger dans la technique d’hyperfocale qui me sera fort utile, entre autre pour la photo paysage (notamment mais pas exclusivement).  J’ai le goût de partager cette technique avec vous.

Incidemment les safaris photos pour cet été affichent presque complet.  René me faisait part qu’il resterait une place dans l’un des groupes au moment de rédiger le présent article.  Par contre, la popularité est telle que déjà des inscriptions sont confirmées pour l’été 2019.  L’invitation vous est déjà lancée.  Un groupe d’intéressés parmi votre club photo?  Un beau projet de voyage photo à envisager en couple?  Pourquoi ne pas obtenir les informations dès maintenant et manifester votre intérêt.

(Note: comme à l’habitude, n’hésitez pas à cliquer sur les photos pour voir celles-ci en grand format.  Celles-ci sont hébergées sur l’excellente plateforme Smugmug.)

Le piège de la diffraction

Avant de connaître l’hyperfocale, j’avais le réflexe de penser que pour obtenir une photo avec une grande profondeur de champ et une netteté appréciable de l’avant-plan à l’arrière-plan, il suffisait de choisir l’ouverture la petite qu’il soit et de faire ma mise au point sur les éléments d’avant-plan.  Comme j’ai fait dans la photo ci-haut.  Trépied, F22, 1/15 seconde.  Voilà!  En apparence, le tour semble joué surtout lorsqu’on examine la photo à faible résolution, réduite pour le bénéfice du Web.

Mais voilà que nous guette le piège de la diffraction qui est un phénomène physique. S’il est relativement complexe à expliquer, l’impact du phénomène de la diffraction dans nos photos est simple à saisir. Alors qu’on croit qu’en minimisant au maximum notre ouverture pour tenter d’obtenir une grande profondeur de champ, nous obtiendrons le plus netteté possible dans notre arrière-plan, voilà que nous occasionnons un résultat inverse.


Dans le cas de la photo ci-haut, j’ai privilégié l’approche que j’ai décrite précédemment: ISO 400, F22, 1/80 seconde, trépied.  Mise au point sur les éléments d’avant-plan.  Tout apparaît correct à première vue.

En isolant et zoomant dans ma photo, vous pouvez constater que les montagnes à l’arrière-plan n’ont rien de précis.  Les pixels affichent une confusion certaine.  Si j’avais réalisé plusieurs photos du même sujet avec des ouvertures différentes, vous auriez constaté que l’arrière-plan afficherait une plus grande précision, voire une meilleure netteté avec une ouverture à F11 ou F14 qu’à F22.  Cette ouverture, la plus petite de cet objectif (Canon 17-55mm), a créé le phénomène de la diffraction.

Note: Les lecteurs assidus de ce blog savent que je ne verse pas beaucoup – sinon pas du tout – dans le diktat du piqué.  Je ne suis pas de ceux qui s’appliquent à examiner chaque recoin d’une photo pour voir la performance de tel ou tel objectif, du capteur, etc.  Par contre, il faut savoir que lorsqu’on produit des tirages de grand format, les détails de nos photos seront beaucoup plus visibles.  À vous de trouver le juste équilibre avec le rendu graphique de votre photo qui est pertinent à votre démarche artistique.

L’hyperfocale: qu’est-ce et quand

Qu’est-ce que l’hyperfocale?  De la plus simple façon, c’est la distance à faire pour votre mise au point qui vous permettra d’obtenir une netteté satisfaisante à la fois pour votre avant-plan et votre arrière-plan.  L’élément important à retenir dans l’affirmation précédente est l’expression «netteté satisfaisante».  Il y a des façons pour obtenir une netteté top niveau dans l’ensemble du photo particulièrement si on a recours à la technique du «focus stacking» qui consiste à prendre plusieurs photos d’un même sujet avec des mises au point décalées.  En superposant celles-ci grâce à un logiciel, on obtiendra alors une photo d’une grande précision dans chacun des plans.  L’hyperfocale ne permettra pas d’obtenir une aussi grande précision que la technique précédente mais plutôt une «netteté satisfaisante» sans courir le risque de la diffraction.  Ne confondons pas la netteté avec les notions de profondeur de champ – déterminée par votre ouverture – ou encore la mise au point.  La netteté est une résultante de la combinaison du choix de votre profondeur de champ et de l’endroit de votre mise au point.  Vous saisissez?

Quand est-il pertinent d’envisager l’hyperfocale?  Celle-ci vous est utile lorsque vous avez des éléments au premier plan et à l’arrière-plan et que vous aimeriez que l’ensemble de ceux-ci aillent la même netteté.  Si vous faites une photo comme la photo ci-contre sans aucun élément au 1er plan, inutile de songer à l’hyperfocale puisque votre mise au point se fera déjà sur un sujet éloigné.  Inutile également de songer à l’hyperfocale si vous faites un plan très rapproché d’un sujet, à quelques pouces/centimètres de votre objectif et espérez avoir une grande profondeur de champ et netteté avec l’arrière-plan.  En définitive, l’hyperfocale devient pertinente seulement lorsque vous avez des éléments à proximité et d’autres au loin.

Reprenons: l’hyperfocale consiste à faire une mise au point à un point déterminé entre nos éléments de premier plan et notre arrière-plan afin d’obtenir une netteté satisfaisante.  Ce point déterminé va varier selon le choix de notre objectif et de notre ouverture.  Il va en résulter que les éléments à compter de la moitié de cette distance hyperfocale et jusqu’à l’infini seront nets.

Trouver les distances hyperfocales

Prenons un exemple concret.  Si je veux que ces branches sont nettes tout autant que mon arrière-plan, je dois trouver la distance hyperfocale appropriée.  La distance doit être telle que la moitié de cette distance permettra à mes branches d’être au net.  Comment connaître la distance requise?

Je vous évite la formule mathématique, non seulement complexe mais, sur le terrain, qui a le goût de se lancer dans de savants calculs?  Euh…pas moi.  Vous voulez vraiment la connaître?  La voici.  Y’a toutefois moyen de faire plus simple.  Tout d’abord, il faut savoir que vous êtes en mesure de trouver sur le Web  des chartes de distance hyperfocale pour vos boîtiers.  Elles sont téléchargeables, s’impriment et se transportent facilement dans votre sac photo.  Ces chartes vous indiquent la distance hyperfocale pour votre appareil selon votre objectif fixe ou encore la distance focale de votre objectif zoom de même qu’en fonction de l’ouverture que vous voulez privilégier.  Il faut alors se souvenir que la netteté s’appliquera à compter de la moitié de cette distance hyperfocale jusqu’à l’infini.

Mieux encore, il existe plusieurs applications pour vos appareils mobiles qui vous permettent de connaître les distances hyperfocales.  J’apprécie particulièrement Hyperfocal Pro mais d’autres applications sont également disponibles.  Dans l’application, vous devez indiquer le modèle de votre boîtier, la distance focale (20mm, 24mm, 28mm, 35mm, etc.) et votre ouverture.  Vous pouvez également indiquer la distance de votre sujet principal.  Grâce à l’application, vous êtes en mesure – à partir des paramètres que vous indiquez – de connaître la distance hyperfocale et voir la zone de netteté qui en découlera.  Vous pouvez indiquer votre préférence quant à l’unité de mesure (métrique ou anglaise).  J’apprécie beaucoup être en mesure de faire des simulations pour mieux comprendre l’impact du choix de la profondeur de champ sur la zone de netteté.  Grâce à ces simulations, vous constaterez que vous pourrez obtenir des résultats fort intéressants avec des ouvertures à F8, F11, F14, sans risque de diffraction.  Rappelons encore une fois que l’hyperfocale ne crée pas la profondeur de champ.   Votre ouverture, oui.  Si vous voulez une grande profondeur de champ et une netteté satisfaisante, explorez alors des ouvertures à F11, F14 ou F18 par exemple, sans aller jusqu’à la plus petite ouverture de votre objectif.

Avec mon exemple ci-haut, faisons l’hypothèse que je compte prendre la photo avec mon boîtier Canon 5D mark III de même que mon objectif Canon 17-40mm.  Je privilégie une distance focale de 24mm.  Avec une ouverture de F8, Hyperfocal Pro m’indique que ma distance hyperfocale est de 8,268 pieds (2,52 mètres).  Par conséquent, tout à compter de 4,134 pieds (1,26 mètres) sera net jusqu’à l’infini.  Si je privilégie une ouverture de F11, ma distance hyperfocale devient 5,869 pieds (1,789 mètres).  Tout à compter de 2,935 pieds (0,895 mètres) sera net jusqu’à l’infini.

Les plus rigolos parmi vous vont me poser la question si je compte sauter dans la vide pour aller mesurer exactement la distance hyperfocale retenue. 🙂  Comment déterminer l’endroit où faire la mise au point selon la distance?  Si vous avez des objectifs comme mon Canon 17-40mm avec des indicateurs, vous êtes en mesure de mettre votre objectif en mode manuel et indiquer la distance de mise au point avec les indicateurs.  Le tout vous apparaîtra flou dans votre viseur mais – ô surprise! – vous constaterez que votre photo sera nette après la prise de vue.  Si ce n’est pas le cas, valider votre distance focale de même que votre ouverture avec les données que vous avez indiquées dans l’application.  N’oubliez pas de travailler avec votre objectif en mode manuel.

L’hyperfocal et le sans-miroir

La difficulté que j’ai rencontrée – peut-être comme plusieurs parmi vous – est liée au fait que plusieurs objectifs plus contemporains n’offrent plus d’indicateurs.  C’est le cas de mon objectif principal 15-45mm pour mon Canon M5.   J’ai pris connaissance d’une autre technique pour l’hyperfocale qui est particulièrement facile à mettre en application.  Cette technique consiste à «doubler la distance».

Voici une photo que j’ai prise pour illustrer le principe de doubler la distance pour réussir une photo en hyperfocale.  (Note: je fais appel à votre indulgence, la photo étant d’une immense banalité 😉).   Dans le cas ci-dessus, j’ai voulu faire une photo nette à compter du panneau indicateur de stationnement (à la gauche) jusqu’à l’infini.

J’ai donc fait ma mise au point sur un élément qui était au double de la distance de mon premier élément.  J’étais à une distance focale de 15mm et une ouverture de F11.  J’ai fait manuellement la mise au point sur le 2ième poteau (rue Cypress) en sachant que les éléments à la moitié de cette distance et jusqu’à l’infini seraient nets.  Vous pouvez constater que les édifices à l’arrière du poteau sont nets de façon satisfaisante. Ils pourraient être plus nets encore si la mise au point avait été fait sur eux mais cela aurait été au détriment de la netteté des éléments au premier plan.

Puisque mon premier poteau de stationnement est inclus dans la moitié de la distance entre mon boîtier et l’endroit de sa mise au point, les éléments au tout premier plan apparaissent suffisamment nets.  Cette technique fonctionne donc bien dans la mesure où des éléments sont présents pour à différentes profondeurs dans notre cadrage pour nous aider à prendre nos points de repère et identifier un élément au double de la distance de notre sujet principal au premier plan. Certains diront également que l’hyperfocale peut toujours s’obtenir en faisant la mise au point sur un élément au tiers inférieur de notre cadrage.

Au final, l’hyperfocale est une technique intéressante à mettre dans votre sac photo.  Pour ce faire, vous pouvez faire appel à une application sur votre appareil mobile (portable) ou encore une charte des distances hyperfocales propre à votre appareil photo.  Vous pouvez également faire appel à la technique de doubler la distance.  Rappelons-nous encore une fois que l’hyperfocale ne créé pas la profondeur de champ.  L’hyperfocale créé la netteté dans votre photo.  Cette netteté sera satisfaisante sur un ensemble d’éléments dans votre photo mais ne peut être équivalente à une mise au point sur chacun de ces éléments.

J’espère que l’article d’aujourd’hui vous aura plu.  Vous faites appel à l’hyperfocal?  Dans quelles circonstances?  N’hésitez pas à commenter.  Vos mots sont importants et votre présence essentielle.  


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3 commentaires pour Mettre l’hyperfocale dans votre sac photo

  1. JACQUART dit :

    Merci pour cet artcle,belle démarche.

  2. René Bourque dit :

    Super intéressant et très bien élaboré.

  3. Daniel Dany Arcoite dit :

    Merci beaucoup pour cette article super intéressant Louis j’adore vous lire

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